Pompili annonce l’abandon du T4

Aéroports, Politiques

La Tribune – 11 Fev 2021

Ce chantier colossal du T4, destiné à augmenter la capacités aéroportuaires de Roissy CDG de 40 millions de passagers par an et dont le coût était estimé entre 7 et 9 milliards d'euros, était contesté par nombre d'associations de défense de l'environnement et d'élus locaux. Barbara Pompili a annoncé ce jeudi qu'il ne sera donc pas lancé.
(Crédits : DR)

Avec ce « T4 », Roissy CDG aurait pu augmenter sa capacité aéroportuaire de 40 millions de passagers par an, mais la ministre de la Transition écologique a demandé au groupe ADP, dont l’Etat est l’actionnaire majoritaire, « d’abandonner son projet », estimant que le « T4 » est « un projet obsolète, qui ne correspondait plus à la politique environnementale du gouvernement et aux exigences d’un secteur en pleine mutation, tourné vers l’avion vert de demain ». Saisissant la balle au bond, une coalition d’acteurs, dont ADP, lancent un appel pour préparer les infrastructures à l’arrivée de l’avion à hydrogène et relever le défi de la décarbonation du transport aérien.

Le gouvernement a décidé d’abandonner le projet controversé d’extension de l’aéroport parisien de Roissy-Charles de Gaulle, « obsolète » à l’heure de la lutte contre le réchauffement climatique, a annoncé jeudi la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili au journal Le Monde.

Le gouvernement a demandé au gestionnaire des aéroports de Paris, Groupe ADP, dont l’Etat est l’actionnaire majoritaire, « d’abandonner son projet et de lui en présenter un nouveau, plus cohérent avec ses objectifs de lutte contre le changement climatique et de protection de l’environnement », a déclaré Mme Pompili au quotidien.

Alors que ce projet passait par la construction à l’horizon 2037 d’un quatrième terminal pour augmenter la capacité de l’équipement de 40 millions de passagers par an, Mme Pompili a estimé que « c’est un projet obsolète, qui ne correspondait plus à la politique environnementale du gouvernement et aux exigences d’un secteur en pleine mutation, tourné vers l’avion vert de demain ».

Un chantier colossal et contesté

Ce chantier colossal au coût estimé entre 7 et 9 milliards d’euros, repoussoir de nombre d’associations de défense de l’environnement et d’élus locaux, ne sera donc pas lancé.

Selon Le Monde« le gouvernement demande désormais à Groupe ADP de proposer un tout autre projet, qui ne sera pas centré sur l’accroissement des capacités de Roissy ».

« Nous aurons toujours besoin des avions, mais il s’agit d’être dans une utilisation plus raisonnée de l’aérien, et d’atteindre une baisse des émissions de gaz à effet de serre du secteur », selon Mme Pompili.

Pour autant, le projet ne ferme pas complètement la porte à une augmentation de capacités à moyen terme, si le projet ne dépasse pas l’emprise actuelle de l’aéroport et n’entraîne pas de hausse des émissions de gaz à effet de serre.

Loi climat : le gouvernement critiqué pour son manque d’ambition

Cette annonce intervient au lendemain de la présentation par le gouvernement de son projet de loi « climat et résilience » issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, un texte vivement critiqué pour son « manque de muscle » par une partie de la gauche et des ONG.

Le projet du nouveau terminal « T4 » avait déjà subi un revers en juillet 2020 lorsque l’Autorité environnementale avait constaté que « l’équation à résoudre » entre l’augmentation des vols, de la circulation routière et le respect des objectifs internationaux de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre n’était « pas décrite ni posée de manière complète ».

Le coup de bambou de la crise sanitaire sur le trafic aérien mondial

La crise sanitaire mondiale, qui a réduit le trafic aérien à la portion congrue, a en outre jeté le doute sur la validité des projections sur l’accroissement continu des flux de voyageurs et donc la nécessité d’adapter les infrastructures.

« Les extensions de capacité à Roissy aujourd’hui paraissent être un pari audacieux », avait alors jugé le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari.

Les acteurs de l’aérien rebondissent en anticipant l’avion à hydrogène

Ce même jeudi, saisissant la balle au bond, une alliance d’acteurs, dont ADP, a lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) inédit pour « explorer les opportunités offertes par l’hydrogène sur les aéroports franciliens ». L’appel à candidatures est ouvert dès aujourd’hui 11 février et sera clos le 19 mars 2021. Les projets sont à déposer via le site h2hubairport.com et ceux qui seront retenus seront annoncés fin avril.

Les auteurs de cet AMI sont la Région Île-de-France, Choose Paris Region, le Groupe ADP, Air France-KLM et Airbus, une alliance d’acteurs tous intéressés à contribuer à l’attractivité de la France et particulièrement de la Région Île-de-France.

Leur appel à manifestation d’intérêt s’inscrit dans le contexte de la stratégie de transition énergétique engagée en France et appuyée par la Commission Européenne, qui va se poursuivre avec l’arrivée de l’avion zéro-émission annoncée pour 2035 et qui permettra de « relever le défi de la décarbonation des activités du transport aérien ».

L’ambition partagée par ces cinq partenaires est de bâtir « un écosystème aéroportuaire puissant et à fédérer, autour de l’hydrogène, des grands groupes, des ETI/PME, des start-ups, ainsi que le monde académique et celui de la recherche ».

Voici les trois grandes thématiques de cet AMI qui vise à transformer les aéroports parisiens en véritables « hubs hydrogène » :

  • le stockage, le transport et la distribution de l’hydrogène (gazeux et liquide) en milieu aéroportuaire (systèmes de stockage, micro-liquéfaction, avitaillement des avions, etc.) ;
  • la diversification des usages de l’hydrogène dans les domaines aéroportuaire et aéronautique (véhicules et engins d’assistance en escale, transports ferrés sur les aéroports, alimentation énergétique de bâtiments ou d’avions lors des opérations en escale, etc.) ;
  • l’économie circulaire autour de l’hydrogène (récupération de l’hydrogène dissipé lors d’un avitaillement en hydrogène liquide, valorisation d’un co-produit d’une réaction en vue de produire de l’hydrogène décarboné, etc.).

Emissions de CO2 : Nice, premier aéroport zéro carbone en 2030 ?

Aéroports, CO2, Empreinte

La première plate-forme aéroportuaire de province promet de ne plus émettre un gramme de CO2 d’ici dix ans. Mais cela ne concerne pas les avions…

 L’aéroport de Nice (Alpes-Maritimes) a dévoilé mercredi 15 janvier un plan d’action pour devenir la première plate-forme « net zéro émission » en 2030.
L’aéroport de Nice (Alpes-Maritimes) a dévoilé mercredi 15 janvier un plan d’action pour devenir la première plate-forme « net zéro émission » en 2030. LP/Matthias Galante

Par Matthias GalanteLe 16 janvier 2020 à 09h56

La saison de la chasse au CO2 est lancée à l’aéroport Nice-Côte d’Azur (Alpes-Maritimes). Elle devrait durer dix années et fera, si l’on en croit les annonces du plan d’action dévoilé par le site, au moins deux victimes : le gaz qui permet de chauffer les bâtiments et le diesel des véhicules, tous les deux remplacés progressivement par la fée électricité. En dévoilant un plan d’actions concrètes pour devenir la première plate-forme aéroportuaire « net zéro émission » (et sans compensation) en 2030, le site azuréen ambitionne de laver plus vert que vert dans un secteur pour le moins décrié par les protecteurs de l’environnement.

Avec 192 aéroports européens, Nice-Côte d’Azur avait initialement pris cet engagement pour… 2050. Promis, juré, cette spectaculaire accélération du calendrier n’a rien à voir, disent les dirigeants, avec les critiques autour de la future extension du Terminal 2, récemment autorisée par l’Etat. « On a une politique volontariste sur ces sujets depuis plus de quinze ans. On veut agir à l’horizon d’une génération […]. On travaille désormais en deux monnaies : l’euro et le CO2. La tendance fait que le transport aérien, s’il veut conserver sa légitimité de développement, doit être exemplaire », justifie Dominique Thillaud, président du directoire d’Aéroports de la Côte d’Azur.

Arbres, appareils filtrants et véhicules électriques

Dès cette année, le modeste aéroport du golfe de Saint-Tropez (Var) deviendrait le premier des trois sites du groupe privé à ne plus émettre un seul gramme de gaz à effet de serre grâce, entre autres, « à l’installation de puits de carbone ». Ce terme énigmatique désigne des plantations d’arbres et l’installation d’appareils filtrant le CO2.

L’affaire sera autrement plus délicate à Cannes-Mandelieu et, surtout, à Nice. Car la plus importante plate-forme aéroportuaire de province n’arrête plus de grossir, avec 14,48 millions de passagers en 2019. Selon le responsable, « des appels d’offres ont été lancés pour des solutions techniques » concernant un nouveau système de chauffage et de refroidissement des immenses édifices, avec, peut-être, des pompes à chaleur. L’installation de panneaux photovoltaïques est prévue. L’électrification de 80 % des véhicules de service « permettra de diminuer 83 % des émissions en 2020 », assure la direction.

Une baisse des taxes pour les compagnies vertueuses

La technologie a cependant ses limites. Les camions de pompiers et les remorqueurs de gros avions tourneront encore un moment avec du bon vieux diesel polluant. « Les derniers grammes seront difficiles à chercher, mais nous y arriverons, lance le patron. Nous proposerons que tout un chacun puisse contrôler nos résultats avec un suivi trimestriel complètement transparent. »

LIRE AUSSI > Et si on connaissait le bilan carbone de nos voyages ?

Le plan d’actions est évalué à « plus de 20 millions d’euros sans fonds publics ». Reste maintenant à convaincre les autres protagonistes de suivre le mouvement, afin que les efforts ne se limitent pas aux seuls bâtiments et pistes.

Le groupe Aéroports de la Côte d’Azur a fait savoir mercredi qu’il voulait proposer aux compagnies aériennes une mesure incitative : une baisse de 5 à 10 % des taxes d’atterrissage « pour des avions qui produisent le moins d’oxyde d’azote (NOx) au roulage à Nice ». Actuellement, les phases d’atterrissage, de roulage et de décollage représentent, selon Dominique Thillaud, 10,75 kg de CO2 par passager. Soit le bilan carbone du transport d’une mangue d’origine tropicale… ou de deux poulets rôtis.

Ile-de-France : l’appel de 67 maires et présidents de collectivités contre l’extension de l’aéroport de Roissy

Aéroports, Bruits, Citoyens, Politiques, Pollutions

Opposés à la construction du terminal T4, les élus franciliens viennent d’adresser une lettre à Emmanuel Macron.

Roissy. Vue du futur Terminal 4 de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle. DR

Par Claire Guédon et Olivia VillamyLe 16 janvier 2020 à 21h01, modifié le 16 janvier 2020 à 21h21

« Monsieur le Président de la République, […] nous vous invitons à abandonner le projet d’extension de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. » La demande formulée dans la lettre commune envoyée le 10 janvier à Emmanuel Macron est très claire. Ils sont désormais 67 maires et présidents de collectivités d’Ile-de-France de tout bord politique à s’opposer à la future construction du gigantesque terminal T4.

Les maires de Nanterre (Hauts-de-Seine), Patrick Jarry (Gauche citoyenne), d’Ermont (Val d’Oise), Hugues Portelli (LR), de Paris, Anne Hidalgo (PS) ou encore de Saint-Denis, Laurent Russier (PCF) sont parmi les signataires, comme les présidents des territoires de Plaine commune et d’Est Ensemble, mais aussi des départements de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.

Echarpe tricolore sur le buste, les élus se sont réunis ce jeudi après-midi au siège de Plaine commune, à Saint-Denis pour faire entendre solennellement et publiquement leur voix et leur différence. Une position nouvelle qui tranche avec l’époque pas si lointaine où les promesses d’emplois des projets d’extension aéroportuaire de Roissy comptaient plus que les questions environnementales.

« Protection du climat & la santé »

« Entre des perspectives de croissance hypothétiques et la protection du climat et de la santé de nos concitoyens, nous avons pour notre part choisi », détaille le courrier dans lequel il est demandé à Emmanuel Macron « d’envisager ensemble la construction d’alternatives génératrices d’activités, écologiquement responsables et protectrices des habitants. »

Non aux nuisances des avions, oui au développement économique, c’est en résumé ce que défendent les élus pour leur région. « On a besoin des emplois mais n’existe-t-il pas d’autres manières d’en créer ? Je crois que la grande question contemporaine, c’est de ne plus opposer les questions sociétales aux questions environnementales », juge David Proult, maire-adjoint à l’aménagement et à l’urbanisme de Saint-Denis.

Le projet d’extension porté par le groupe ADP s’inscrit effectivement dans des prévisions d’augmentation de trafic, estimées entre 2 et 3 % par an. « L’ouverture du terminal 4 représenterait 38 % de trafic en plus. Pour une ville comme Epinay, c’est colossal », s’alarme Eugénie Ponthier, maire-adjointe à l’origine de l’appel.

A l’horizon 2037, année où le T4 est censé être en service dans sa totalité, Roissy pourrait supporter entre 107 et 126 millions de passagers annuels (contre 76,2 millions en 2019) et enregistrer entre 620 000 à 660 000 mouvements d’avions (contre 498 175 en 2019).

Saint-Denis, le 16 janvier. Les maires d’une soixantaine de communes d’Ile-de-France s’opposent au projet d’extension du terminal 4 de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Ils dénoncent la pollution atmosphérique et sonore du projet. LP/Olivia Villamy
Saint-Denis, le 16 janvier. Les maires d’une soixantaine de communes d’Ile-de-France s’opposent au projet d’extension du terminal 4 de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Ils dénoncent la pollution atmosphérique et sonore du projet. LP/Olivia Villamy  

« Ils nous promettent 50 000 emplois mais c’est du vent ! »

« Ce T4 va surtout servir à faire des escales, pour répartir les gens en transit mais ça ne va pas profiter au territoire », craint Hervé Chevreau, maire (SE) d’Epinay-sur-Seine.

Un point de vue partagé par Xavier Melki, maire (LR) de Franconville (Val-d’Oise). « Ils nous promettent 50 000 emplois mais c’est du vent ! Combien d’emplois directs ? Combien d’emplois pérennes ?, s’interroge-t-il. Quand on regarde les chiffres, depuis 6 ans le nombre d’emplois a baissé sur la plate-forme de Roissy malgré la hausse exponentielle des vols. »

Les doutes de l’élu font écho à une polémique qui a entouré les hypothèses économiques indiquées par le groupe ADP, lors de la concertation préalable organisée entre février et mai 2019. Selon le GIP Emploi de Roissy (qui rassemble partenaires privés et publics depuis 1998), le nombre de postes liés au Terminal 4 pourrait représenter 4 000 à 5 000 emplois par an, en phase chantier et à terme, entre 40 600 et 44 700 emplois, pour la phase exploitation.

L’enquête publique pour « autorisation environnementale » aura lieu au deuxième trimestre 2020.

Ma vie dans le Bruit

Aéroports, Bruits, Cie Aériennes, Citoyens, Politiques, Pollutions

France2 – Envoyé Spécial – 2020 01 14

Avions, trains ou voitures qui passent à toute allure… En France, près de 9 millions de personnes seraient exposées au bruit infernal des transports.

Limites selon OMS :
45 dB avions ( mesuré à 85 dB)
53 dB trafic routier
54 dB Train
Pour l’ANSES :
Au delà de 65 dB le bruit devient un problème sanitaire

Jean-Baptiste Djebbari : « le secteur aérien a toute sa place pour l’avenir »

Aéroports, Cie Aériennes, Non classé, Politiques
Congrès de l’UAF – TourMag – Rédigé par Pierre Georges le Jeudi 7 Novembre 2019
Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’Etat au Transport lors du congrès de l’UAF : « Le programme est vaste mais nous pouvons le relever collectivement. Je suis prêt, je compte sur vous et vous pouvez compter sur moi »

Placé cette année sous le thème des « ruptures », le deuxième congrès annuel de l’Union des aéroports français (UAF), qui se tenait à Montrouge (Hauts-de-Seine) jeudi 7 novembre 2019, a vu s’entremêler les grands débats qui agitent actuellement le secteur.

« Cette année a vu éclore une interrogation sociale sur la place de l’aérien dans la société », a résumé Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’Etat au Transport, venu clore les débats.

« Je partage avec vous l’idée que le transport aérien est un transport complémentaire aux autres, et qu’il a la nécessité de participer au désenclavement des territoires. Je veux vous réaffirmer que le secteur aérien va s’ajuster et qu’il a toute sa place pour l’avenir », a lancé, optimiste, le ministre (également pilote de ligne diplômé de l’Enac) devant les membres de l’UAF.

Pour lui, la compétitivité et la transition vers une aviation durable sont les deux enjeux principaux qu’a à relever l’aérien actuellement.

« Le programme est vaste mais nous pouvons le relever collectivement. Je suis prêt, je compte sur vous et vous pouvez compter sur moi ».

« Le rapport au voyage et aux aéroports est en train de changer. Nous n’avons jamais vu un secteur confronté a autant d’évolutions, de ruptures et de défis aussi multiples en même temps », a-t-il poursuivi, évoquant pèle-mêle la forte intensité concurrentielle, la consolidation des acteurs du secteur, l’impact du digital sur certains métiers, et plus globalement la mise à mal de la compétitivité du transport aérien français.

« Le pavillon français ne profite pas de la croissance mondiale. Si les Assises du transport aérien ont permis de dresser un agenda des solutions, nous ne sommes peut-être pas allés jusqu’au bout de l’exercice », a ensuite reconnu le secrétaire d’Etat, interpellé par Thomas Juin, président de l’UAF.

« 2019 aura été une année de rupture lors de laquelle s’est installé un climat hostile au transport aérien, qui nous a pris au dépourvu », avait auparavant résumé ce dernier, déplorant l’absence de mesures fortes prises par le gouvernement pour aider le secteur et regrettant encore la mise en place en janvier 2020 d’une écotaxe « punitive plutôt qu’incitative ».

« C’est une occasion manquée pour notre pays d’accompagner la transition écologique du secteur », a estimé Thomas Juin.

Décryptage Restons les pieds sur Terre.

Congrès de l’Union des Aéroports de France : Il faut mobiliser

La place de l’aérien dans la société : 15%

Participer désenclavement des territoires : Faut pas exagérer

Le pavillon Français ne profite pas de la croissance mondiale : Laquelle ?

Non au projet d’extension de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle

Aéroports, GIEC, Organisation, Politiques

Par Un collectif d’associations — 14 octobre 2019 à 15:15

En contradiction avec les objectifs de l’accord de Paris sur le climat, le projet de terminal 4 à Roissy-Charles-de-Gaulle doit être abandonné, estime un collectif d’associations dans une lettre ouverte au président de la République.

Tribune. Monsieur le président de la République,

Nous vous demandons l’abandon du projet d’extension de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle (terminal 4) au nom de l’urgence climatique. Lors de votre discours du 24 septembre à l’assemblée générale de l’ONU, vous avez déclaré qu’il fallait «remettre en cohérence nos agendas et nos actions» et qu’il fallait «que les grands pays de ce monde arrêtent de financer de nouvelles installations polluantes dans les pays en voie de développement». Vous avez également déclaré vouloir mener «cet agenda de réconciliation» en France et en Europe.

En toute cohérence, cette ligne est également celle de votre gouvernement. Comme l’a déclaré votre secrétaire d’Etat Brune Poirson, représentante de la France lors de la COP24 à Katowice, «les scénarios du Giec sont connus de tous. Nous ne sommes pas sur la bonne trajectoire d’émissions pour survivre. […] Ce diagnostic, nous l’avons tous reconnu en signant l’accord de Paris. Il nous incombe donc d’être cohérents, c’est-à-dire d’agir en conséquence à tous les niveaux».

Cette cohérence est en effet essentielle. Elle est même la condition de la confiance des citoyens dans l’action politique. Et c’est cet agenda de cohérence entre les mots et les actes que nous appelons de nos vœux dans le domaine du transport aérien aujourd’hui.

Vous avez mis en place le Haut Conseil pour le climat. Ce dernier a également mis en avant l’exigence de cohérence dans son rapport 2019. Selon ce rapport, «l’objectif de neutralité carbone en 2050 visé par la stratégie nationale bas carbone révisée est cohérent avec les objectifs de l’accord de Paris et les dernières connaissances scientifiques, mais il ne couvre pas l’entière responsabilité de la France car les émissions liées aux transports aériens et maritimes internationaux et aux importations ne sont pas incluses».

Le transport aérien illustre en effet pleinement ce mur de l’incohérence auquel nos responsables politiques se heurtent trop souvent. Et le projet de terminal 4 à Roissy porté par le groupe ADP est plus encore archétypal. Selon les chiffres d’ADP, le terminal 4 pourrait générer une hausse de trafic aérien de 38% d’ici 2037, avec 500 avions de plus par jour (au total 1 800 vols quotidiens) et 40 millions de passagers de plus par an. Soit la capacité de l’aéroport d’Orly ajoutée à celle de Roissy! Ce trafic accru ajouterait 12 Mt d’équivalent CO2 aux émissions annuelles de la France d’ici 2037

Or, pour atteindre l’objectif de neutralité carbone que s’est fixé le pays pour 2050, il ne faudra pas émettre plus de 100 Mt d’équivalent CO2 en 2037. A cette date, le trafic lié au terminal 4 représenterait donc à lui seul 12 % des émissions autorisées pour la France, et le trafic total de Roissy environ 35% (1).

Enfin, la Commission nationale du débat public, reléguée au rôle ingrat de simple garant de la concertation préalable menée par le groupe ADP – par un artifice juridique dénoncé par sa présidente Chantal Jouanno (2) –, n’a pas manqué de noter dans son bilan de la concertation qu’«il conviendrait que l’Etat précise comment l’évolution du trafic s’insère dans le cadre des engagements internationaux de la France dans la lutte contre les changements climatiques».

A notre connaissance, aucune réponse satisfaisante n’a été fournie à ce questionnement. La contribution de la Direction générale de l’aviation civile datant de juillet (3) invoque une taxe trop faible pour qu’elle infléchisse la croissance du trafic de manière significative et renvoie à une logique de compensation carbone dont la pertinence pour réduire l’impact climatique de l’aérien n’est aujourd’hui pas démontrée.

En effet, selon une enquête réalisée pour la Commission européenne, 85% des projets de compensation analysés avaient une faible probabilité de remplir les critères attendus en matière de réduction d’émissions (4). La croissance des émissions de gaz à effet de serre du transport aérien n’est pas compatible avec les objectifs de l’accord de Paris sur le climat (5).

Dès lors, il ne fait aucun doute que le projet de terminal 4 à Roissy-Charles-de-Gaulle n’est pas cohérent avec les engagements de la France. C’est pourquoi nous demandons instamment que l’Etat, au nom de la cohérence climatique, s’oppose à cette extension aéroportuaire. Alors que l’urgence climatique se fait plus pressante, il faudrait même aujourd’hui amorcer la décroissance du transport aérien en s’appuyant sur une fiscalité incitative permettant également de financer des alternatives, et en premier lieu les trains, de jour comme de nuit. Longtemps négligés, ces derniers peuvent permettre, sans grands travaux, de connecter l’Europe sur des distances pouvant atteindre 1 500 km, ce qui couvre une large part des destinations aériennes. Avec nos très respectueuses salutations,

Signataires : Advocnar, Non au T4, Réseau action climat, Fnaut, France nature environnement, France nature environnement IDF, Amis de la Terre, Stay Grounded, Oui au train de nuit, Alofa Tuvalu, TaCa Agir pour le climat, Alternatiba ANV-COP21 Paris.

(1) Selon la DGAC, le trafic aérien de Roissy a été responsable de l’émission de 13,2 Mt CO2 en 2018 (LTO + 1/2 CR + APU) pour 72,3 millions de passagers. En 2037, on peut estimer qu’il sera responsable de l’émission de 17,4 Mt CO2, dont 6,2 Mt attribuables aux 40 millions de passagers supplémentaires accueillis par le T4. Nous avons tenu compte dans le calcul de la diminution des émissions par passager en supposant que le rythme d’amélioration de l’efficacité de 0,85% par an constaté depuis 2010 se poursuivrait jusqu’en 2037. Pour tenir compte du forçage radiatif des traînées de condensation et cirrus induits et des émissions de CO2 liées à la production du kérosène, il faut, selon l’Ademe, multiplier par 2,2 le chiffre d’émission de CO2, soit 35 Mt CO2 pour l’ensemble de l’aéroport en 2037.

(2) Lettre de la présidente de la CNDP adressée le 7 juin 2018 au Premier ministre ainsi qu’à la ministre des Transports, la présidente de la région Ile-de-France et le ministre de la Transition écologique et solidaire. Dans cette lettre, elle demandait également que soit organisé un débat public sur la cohérence des projets envisagés dans le nord de l’Ile-de-France (Terminal 4, Europacity, CDG Express, ligne 17 et infrastructures olympiques), sujet non abordé lors des débats relatifs à chacun de ces projets.

(3) Conclusions de la CNDP sur la concertation Terminal 4. Contribution de la DGAC pour la réponse des pouvoirs publics à la demande de précision numéro 3. Juillet 2019.


21 membres du GIGNV, des Gilets Jaunes, d’Attac 44 et d’XR Nantes pointent les effets néfastes et la nécessité de réduire le trafic aérien.

Actions, Aéroports, Opposants, Organisation

Ce mercredi 10 juillet à Nantes

On en parlait à peu près partout, mais pas encore dans un aéroport. C’est chose faite depuis que des citoyens engagés dans les collectifs du GIGNV (groupe nantais du mouvement Action non-violente COP21), d’Attac 44, des Gilets Jaunes, d’Extinction Rebellion et d’Alternatiba Nantes ont mené une action pointant l’impact de l’aviation sur le climat.

Il y a quelques jours, des députés ont déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à limiter le trafic aérien substituable en train. Pendant ce temps, une concertation sur le projet de de réaménagement de l’aéroport de Nantes-Atlantique se déroule du 27 mai au 31 juillet. 

Remettre en cause la croissance du trafic aérien

Le but affiché de ce réaménagement : faire face à la croissance continue du trafic de l’aéroport. « Toutes les projections exposées dans le projet de réaménagement envisagent une croissance importante du trafic aérien à Nantes [1]. Or même avec un taux de remplissage plus élevé et une amélioration de l’efficacité énergétique, cette croissance conduit à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre. C’est complètement déconnecté de l’urgence climatique et incompatible avec les engagements de la France ! » explique Steffie, membre du GIGNV.
« Si on veut préserver un avenir pour l’Humanité, il faut réduire au plus tôt nos émissions de gaz à effet de serre, donc réduire le trafic aérien. » ajoute Enora, membre d’Extinction Rebellion Nantes. « D’ailleurs, les personnes avec qui nous avons discuté, bien qu’elles soient là pour prendre un avion, ont bien conscience du problème et acceptent d’en débattre ».

« Les riverains ont raison de protester contre les nuisances sonores et autres : l’impact sur la santé est réel ! D’ailleurs, personne ne veut vivre à proximité d’un aéroport. », signale Pierre-Jean, membre des Gilets Jaunes de Nantes. « Au-delà, c’est la société toute entière qui doit s’interroger : est-il raisonnable, en 2019, de construire de nouveaux aéroports, ou de les agrandir comme à Nantes ou à Roissy avec le terminal 4 ? Sachant que les déplacements en avion, à l’échelle mondiale mais aussi à l’échelle nationale, reste un privilège des plus riches ? » 

Benjamin d’Attac 44 abonde : « Nous devons nous mobiliser contre la politique anti-sociale et anti-climatique du gouvernement en matière de transports : privatisation du groupe Aéroports de Paris, extension des aéroports et bétonisation des terres agricoles, démantèlement du réseau ferroviaire… »

Devenir “avionteux” et “fierroviaires”

L’urgence climatique ne semble pas prise en compte dans l’équation du réaménagement de l’aéroport Nantes-Atlantique, alors qu’elle occupe une place de plus en plus importante pour l’opinion publique. La crainte que des mesures d’interdiction soient impopulaires est démentie par un sondage récent qui indique que 69 % de la population française est favorable à l’interdiction des vols intérieurs substituables en train [2]. 

La honte de prendre l’avion devient même un phénomène en Suède ; le terme “flygskam” désigne cette honte. « Nous aussi, nous devrions être “avionteux” ! » s’exclame Steffie, du GIGNV. « Nous devons réorienter les politiques publiques en matière de transports pour privilégier les modes les moins émetteurs : marche, vélo, train… devenons “fierroviaires” ! »

Le GIGNV, comme Alternatiba, Attac, ANV-COP21 et 200 autres organisations du monde entier sont signataires de l’appel Stay Grounded (“Rester sur Terre”) [3], qui porte 13 revendications dont : le développement d’autres modes de transport tel que le ferroviaire, un moratoire sur la construction et l’agrandissement d’aéroports, la fin des avantages fiscaux donnés à l’aviation avec notamment la taxation du kérosène, et l’interdiction de la publicité pour l’industrie du transport aérien.

Mardi 9 juillet, le gouvernement a annoncé la mise en place d’une « éco-contribution » sur les vols au départ de la France. Mais la mesure est si faible qu’elle ne peut avoir d’effet dissuasif ni d’impact structurant sur le secteur aérien. De plus, elle ne résout en rien le problème des avantages fiscaux accordés à la filière : l’exonération de taxes sur le kérosène coûte 3,63 milliards d’euros. Une initiative citoyenne européenne a d’ailleurs été lancée en mai 2019 pour taxer le kérosène : https://www.endingaviationfueltaxexemption.eu/ 

[1] Un passage de 6,2 millions de voyageurs en 2018 à 11,4 millions en 2040 est anticipée, ainsi qu’une évolution de 57 600 à 89 000 du nombre de mouvements d’avions commerciaux entre 2018 et 2040. Voir sur https://www.reamenagement-nantes-atlantique.fr/comprendre-le-projet/documentation  

[2] Sondage Elabe pour BFMTV : “Sondage BFMTV – Climat: 23% des Français ont déjà renoncé à l’avion pour partir en vacances“, 26/06/19 

[3] https://stay-grounded.org/ 

Contact presse : 

gignv@riseup.net Photos HD de Raphaël Bodin, disponibles pour la presse : https://we.tl/t-ZqMzMoNBzo